Ces corn-dogs thaï maison associent de tendres saucisses cocktail à une pâte dorée et moelleuse pour un snack irrésistible à partager.
Le vendeur brandit une brochette de bambou qui rappelle un micro de scène rétro. La « tête » est une sphère dorée qui exhale un parfum de sucre vanillé. Croquez : la croûte se fend dans un craquement et révèle un gâteau aérien. Au centre, une lamelle de saucisse rouge vif, légèrement salée.

Pour de nombreux Thaïlandais, cette première bouchée est un raccourci vers la kermesse de l’école et les fêtes foraines du temple. Pourtant, le Pong Neng n’est pas qu’un simple cousin du corn-dog.
Sa pâte, plus sucrée, demande patience et triple friture (procédé encore plus poussé qu’une double friture) et son histoire remonte aux fêtes foraines des temples de l’époque d’Ayutthaya.

Des foires d’Ayutthaya au snack de rue nostalgique
La friture s’est diffusée au Siam sous l’influence conjointe des Portugais et des marchands chinois, popularisant les pâtes sucrées à frire. À un moment de la période d’Ayutthaya (XVIe–XVIIIe siècles), ces inspirations se sont rencontrées dans les fêtes de temple et ont donné naissance à une friandise enrobée de pâte, plus tard surnommée Pong Neng parmi d’autres appellations locales, lointain cousin du vietnamien Banh Cam.
Des stands illuminés aux lanternes jalonnaient alors les cours des monastères ; les marchands faisaient tourner les brochettes pour que les petites boules cuisent uniformément. Leurs silhouettes voltigeaient telles des lucioles devant les lampions de papier. Les enfants inventèrent des surnoms, « grosse tête », « microphone », … pour rire de sa forme gonflée.
Les dynasties ont disparu et les capitales ont changé, mais la friandise est restée dans les foires, offrant pour quelques bahts une émotion capable de couvrir le vacarme des orgues de foire. Les Bangkokois plus âgés se souviennent encore avoir traversé en courant les cours des temples, serrant contre eux une boule dégoulinante tandis que les moines psalmodiaient les soutras du soir.
Du cœur de coco à la saucisse du « corn-dog thaï »
Les récits les plus anciens évoquent une garniture de noix de coco râpée cuite avec du sucre de palme : un cœur intégralement sucré. Mais, au milieu du XXe siècle, la Thaïlande est tombée sous le charme du hot-dog occidental : bon marché, longue conservation, rouge de fête foraine.
Les vendeurs ont constaté que la saucisse conservait sa forme malgré plusieurs immersions, apportait une note salée et leur épargnait surtout l’épluchage de coco. Ainsi, le Pong Neng est passé discrètement de dessert à en-cas sucré-salé.
Les comparaisons avec le corn-dog américain ont fleuri, mais la parenté reste superficielle. Ici, pas de farine de maïs : seulement de la farine de blé, des œufs et assez de sucre pour dorer la croûte plus profondément que les beignets américains des parcs d’attractions.

Anatomie d’un Pong Neng classique
La pâte est d’une désarmante simplicité : farine de blé ordinaire fouettée avec des œufs, une bonne quantité de sucre, une cuillerée à café de levure chimique et une rasade de lait ou d’eau. Beaucoup ajoutent une ou deux cuillères de farine de riz afin que l’enveloppe reste croustillante une fois la vapeur dissipée.

L’extrait de vanille, touche moderne désormais incontournable, parfume durablement la pâte. Un repos d’une demi-heure au réfrigérateur détend le gluten et refroidit l’amidon ; lorsque la pâte froide rencontre l’huile à 165 °C, elle s’épanouit en une éponge plus légère et moins grasse, entre beignet et génoise.
La méthode de la triple friture
Obtenir une sphère régulière exige de la méthode. Les vendeurs piquent un tronçon de saucisse de deux à trois centimètres, le plongent dans une pâte bien froide versée dans un verre étroit, puis l’abaissent dans une huile miroitante tout en faisant tournoyer la brochette sans arrêt.
Après environ une minute, la sphère remonte, refroidit juste assez pour ternir sa brillance, puis replonge pour une deuxième couche et, enfin, une troisième. Le procédé forme une boule de cinq à six centimètres de diamètre, croustillante à l’extérieur et aérienne à l’intérieur. En cas d’huile au-delà de 170 °C, la croûte brunit trop vite et peut rester crue à cœur ; manquer une immersion fait s’affaisser la silhouette caractéristique du ballon.
Authenticité, variantes modernes et où déguster un Pong Neng aujourd’hui
Interrogez les inconditionnels : ils citent quatre critères non négociables : une pâte de blé sucrée, au moins trois passages dans l’huile brûlante, un bâtonnet bien centré et une garniture de saucisse ou, à l’ancienne, de cœur de coco.
Les débats font rage sur les trottoirs : certains jurent par une quatrième immersion pour plus de volume, d’autres défendent l’astuce des « deux farines » , tandis que les influenceurs TikTok terminent à la chapelure, dissimulent un cube de mozzarella pour un effet cheesy ou parfument la pâte au curry rouge avant de l’accompagner d’une sauce aigre-douce. Les puristes lèvent peut-être les yeux au ciel puis finissent quand même par nettoyer le bâtonnet.
Dénicher aujourd’hui la version classique relève d’un petit pèlerinage. Quelques fêtes de temple du centre de la Thaïlande embaument encore la nuit d’effluves de vanille et d’huile chaude ; à Ratchaburi, un vendeur propose même des Pong Neng miniatures pour environ un baht pièce, attirant une foule nostalgique.

À Bangkok, entre un stand de boeuf au basilic thaï fumant, un wok de nouilles sautées et une marmite de Tom Yum bouillonnante, des chariots éphémères prennent place devant les écoles primaires autour de la Journée des Enfants.
Les réseaux sociaux les saluent alors comme « ขนมแห่งความทรงจำ » (en-cas des souvenirs) tandis que les anciens élèves revivent leurs récréations. Et pour ceux qui vivent loin de tout stand, les supermarchés vendent désormais des saucisses rouges spécialement étiquetées « pour Pong Neng », prêtes à être enrobées et frites à la maison : préparez la pâte, laissez-la refroidir, tournez jusqu’à ce que la croûte brunisse, puis savourez tant que flottent encore les effluves de vanille mêlées à celles des fêtes foraines.

Authentiques Pong Neng – Corn dogs thaï
Ingrédients
- 6 brochettes en bambou
Pâte
- 200 g de farine de blé tout usage
- 50 g de sucre en poudre
- 0.5 cuillère à café de sel
- 1 cuillère à café de sucre vanillé
- 0.5 cuillère à café d’extrait de vanille
- 1 cuillère à café de levure chimique
- 235 ml d’eau
- 2 œufs
Brochettes
- 6 petites saucisses cocktail
Friture
- 600 ml d’huile végétale ou en quantité suffisante selon la taille de votre casserole
Procédé
Préparation de la pâte
- Préparer un tamis ou une passoire fine.

- Mélanger la farine, la levure chimique, le sel et le sucre vanillé puis tamiser ce mélange dans un bol.200 g de farine de blé, 1 cuillère à café de levure chimique, 0.5 cuillère à café de sel, 1 cuillère à café de sucre vanillé

- Battre les œufs au fouet jusqu’à ce qu’ils moussent.2 œufs

- Ajouter le sucre en poudre petit à petit en fouettant jusqu’à obtenir un mélange pâle et aérien.50 g de sucre en poudre

- Incorporer progressivement le mélange de farine tamisée et l’eau jusqu’à homogénéité.235 ml d’eau

- Parfumer avec l’extrait de vanille.0.5 cuillère à café d’extrait de vanille

- Laisser reposer la pâte 20 minutes.

Assemblage et friture
- Enfiler une saucisse à l’extrémité de chaque brochette.6 petites saucisses cocktail, 6 brochettes en bambou

- Chauffer l’huile végétale dans une casserole profonde à feu moyen jusqu’à ce qu’elle soit bien chaude.600 ml d’huile végétale

- Tremper une brochette dans la pâte pour l’enrober généreusement.

- Plonger dans l’huile chaude et frire jusqu’à coloration blond ambré.

- Égoutter sur une grille jusqu’à tiède.
- Répéter les trempages et fritures 3 à 4 fois pour obtenir l’épaisseur d’enrobage désirée.

- Servir les brochettes de saucisses en pâte frites bien chaudes.

Notes
Sources culinaires
• Pong Neng, dessert thaï traditionnel à déguster absolument – FOOD EQUIPMENT (thaï)
• Pong Neng – ครัวบ้านพิม (thaï)
• Photo de stock « Pong Khong Nam » réalisée en Thaïlande (1369726025) – Shutterstock (anglais)
• Pong Neng au calmar avec saucisse fumée Betagro – Facebook (thaï)
