Ce sisig philippin marie porc et foie grillés, calamansi acidulé et piments pour un plat principal aussi croustillant que relevé.
Il se reconnaît au bruit : un grésillement impatient qui s’élève d’une plaque en fonte. Là, la viande affronte directement la flamme. Un parfum vinaigré s’élève, suivi d’une fumée marquée par le passage sur le charbon ardent.
Bien avant que la foule ne se penche sur ce crépitement spectaculaire, le sisig était un mets discret : une salade acidulée servie à température ambiante, prescrite pour calmer l’estomac des futures mères kapampangans.
Un peu d’histoire
En 1732, le frère augustin Diego Bergaño a consigné le mot « sisig » dans son dictionnaire kapampangan-espagnol. Il ne parlait pas du tout de porc, mais de papaye verte ou de goyave macérées dans du vinaigre de palme, du sel, du poivre et un peu d’ail, un tonique acide censé apaiser le lihi, ou envies de grossesse. L’acidité définissait le plat. La viande ne deviendra courante qu’au début du XXe siècle.
Au début des années 1900, les cuisiniers de Pampanga pensaient déjà « du museau à la queue ». Les têtes de porc bouillies, le maskara hérissé d’oreilles, de groin et de bajoues, étaient émincées en bouchées puis mêlées à du sukang sasá, un vinaigre de palmier nipa, à des oignons et à l’incendiaire piment œil-d’oiseau. Servi à température ambiante, le mélange se situait à mi-chemin entre la salade et le ceviche, connu localement sous le nom de kilawin.
Le plat a pris son tournant décisif pendant l’occupation américaine, au milieu du XXe siècle, le long des grillages de la base aérienne de Clark. Les bouchers américains se souciaient peu des têtes de porc, les jetant ou les vendant pour quelques centavos. Les marchands kapampangans, économes par nature et fiers de leur palais, ont saisi ces rebuts pour les intégrer à leur salade acidulée. Ce qui n’était qu’un remède est devenu un casse-croûte d’ouvrier, parfait avec un verre de San Miguel glacé, tout comme le lechon kawali.
Puis vint 1974 et l’éclair de génie, ou peut-être l’accident, de Lucia « Aling Lucing » Cunanan. Une fournée d’oreilles de porc grillées avait noirci plus que prévu. Au lieu de les jeter, elle a haché ces éclats fumés, les a mêlés à du foie de poulet et à de la cervelle de porc écrasée et, détail décisif, a disposé le tout sur un plat métallique brûlant qui crépitait encore à l’arrivée sur la table du client. La même année, le ministère philippin du Tourisme a reconnu Angeles City comme la « capitale du sisig des Philippines », et ce qui n’était qu’une affaire d’économie est devenu une icône nationale.
Et donc, c’est quoi un Sisig exactement ?
Demandez à un Kapampangan ce que doit contenir un véritable sisig et la réponse est toujours la même : on commence par le maskara (oreilles pour le croustillant, groin pour la gélatine, joues pour la chair juteuse), avec, en plus, une cuillerée de foie de poulet ou de cervelle de porc écrasée pour une texture soyeuse.
L’assaisonnement reste spartiate : vinaigre naturel de palmier nipa et jus frais de calamansi pour la vivacité ; sel, poivre concassé et une quantité redoutable d’oignons hachés ; lamelles de piment œil-d’oiseau assez ardentes pour faire siroter une bière entre deux bouchées. Pas de sauce soja, pas de sucre, pas de raccourci crémeux.
La préparation se déroule en trois actes :
- Bouillir la tête avec feuilles de laurier et grains de poivre jusqu’à ce que le cartilage cède au couteau.
- Griller ensuite les morceaux sur charbon, jusqu’à ce que la peau cloque et que la viande soit délicieusement fumée.
- Enfin, hacher le tout à la main (jamais mixé) en brunoise fine, puis jeter sur une poêle en fonte lustrée de graisse de porc fondue. À la toute fin, incorporer vinaigre, calamansi, oignons et piments, comme pour assaisonner une « salade chaude ».
Le plat arrive sans ornement, hormis quelques demi-calamansis dont l’huile d’agrumes parfume la vapeur.
La controverse de l’œuf et de la mayo
Pour déclencher une dispute dans une cuisine philippine, il suffit de casser un œuf cru sur un sisig, ou, pire, d’y incorporer de la mayonnaise. Les traditionalistes font valoir que le foie ou la cervelle fond déjà en émulsion naturelle ; ajouter de la mayo est un succédané maladroit qui émousse la vivacité du vinaigre.
Un jaune déposé sur la plaque grésillante est toléré par certains comme garniture, mais peu de Kapampangans le jugeraient essentiel. D’autres libertés comme remplacer la tête par de la poitrine de porc, du poulet ou du tofu, réduire la viande en pâte ou empiler du chicharrón par-dessus, peuvent donner un casse-croûte agréable, mais elles font perdre le croustillant du cartilage et l’équilibre acide-savoureux qui définissent l’original.
Même la fameuse plaque grésillante, bien qu’adorée, est techniquement optionnelle ; ce qui compte, c’est l’harmonie entre la viande, le feu et l’acidité.
Le sisig dans la culture kapampangan
Pour les habitants de Pampanga, le sisig est plus qu’un en-bouche de bar : c’est un emblème. Les locaux se saluent avec cette fanfaronnade : « Basta Kapampangan, sisig mu ing sakalam ! », autrement dit : notre sisig est le plus fort, le meilleur. Partager une assiette grésillante est considéré comme un acte d’amour, un picorage collectif de morceaux croustillants tandis que les bouteilles de bière perlent de condensation.
Depuis 2003, chaque décembre, les rues d’Angeles s’enflamment lors du festival du sisig Sadsaran Qng Angeles, où d’immenses grils rougeoyants évoquent des pistes d’atterrissage et où les cuisiniers rivalisent d’adresse. Le conseil municipal a adopté en 2017 une ordonnance patrimoniale pour protéger la recette : un bouclier civique contre la mayonnaise et les raccourcis.
Authentique Sisig Philippin
Ingrédients
- 750 g de morceaux de porc (oreilles, peau et joue) grillés
- 250 g de foie de poulet grillé
- 2 oignons blancs émincés
- 10 calamansi (ou citrons verts) pressés
- 1 piment vert finement tranché
- 2 piments rouges labuyo finement tranchés
- sel au goût
- poivre au goût
Garnitures
- piment tranché
- jeunes oignons
- calamansi
Procédé
- Grillez les morceaux de porc (oreilles, peau et joue) jusqu’à ce qu’ils soient bien dorés.750 g de morceaux de porc (oreilles, peau et joue)
- Grillez les foies de poulet jusqu’à ce qu’ils soient bien dorés.250 g de foie de poulet
- Hachez finement les morceaux de porc grillés et réservez.
- Hachez finement le foie de poulet grillé.
- Dans un grand bol, mélangez les morceaux de porc hachés et le foie de poulet.
- Ajoutez les oignons, les piments et le jus de calamansi ; ajoutez davantage de jus si vous souhaitez plus d’acidité.2 oignons blancs, 10 calamansi (ou citrons verts), 1 piment vert, 2 piments rouges labuyo
- Assaisonnez de sel et de poivre, selon le goût.sel, poivre
- Servez dans une assiette et garnissez d’une tranche de calamansi et de piment.piment tranché
- Pour une présentation sur une plaque chaude, préchauffez la plaque, huilez, disposez le sisig, puis garnissez d’une tranche de calamansi et de piment.
Notes
Sources culinaires
• Les origines du sisig – Positively Filipino (anglais)
• Sisig : l’histoire tragique derrière notre pulutan préféré – Pepper.ph (anglais)
• Recette de sisig grésillant – Freedom Republic (anglais)
• Sisig – Wikipédia (tagalog)
• Vol. 10 nº 71 – Punto (anglais)
• Le cuisinier maison heureux : sisig grésillant – Positively Filipino (anglais)
• Cuisine kapampanga : un goût du « cœur culinaire » des Philippines – Inquirer (anglais)
• Voyage gastronomique à Angeles : à la recherche du meilleur sisig dans son lieu de naissance – Zoy To The World (anglais)
• Du sisig croustillant au leche flan au halo-halo, d’Ilocos à Pampanga – Lifestyle.INQ (anglais)
• Goûtez le véritable sisig original chez Aling Lucing – sans œuf… – Facebook (tagalog)
• Actualités – Mama Sita Foundation (anglais)
• Sisig facile de poitrine de porc sans foie ni mayo – Eat With Carmen (anglais)
• J’essayais de préparer un sisig philippin authentique… – Reddit (anglais)
• Recette de sisig de tricheur avec porc haché – TikTok (anglais)
• Recette authentique de sisig kapampangan à la poitrine de porc – Foxy Folksy (anglais)
• Préparé un sisig de poitrine de porc grésillante pour le dîner – Reddit (anglais)
• Le véritable sisig sans œuf ni mayonnaise – 9GAG (tagalog)